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lundi 19 novembre 2012

Flandre à droite, Wallonie à gauche : Et Bruxelles ?


Flamands et francophones ne se contentent pas d’exister sur deux territoires politiques (partis, médias, syndicats) totalement distincts. Ils expriment aussi traditionnellement des opinions politiques sensiblement différentes, voire incompatibles.

Les élections communales l’ont encore largement démontré ; tandis que la Flandre proteste en votant à (l’extrême) droite, la Wallonie reste fidèle au Parti socialiste et connaît peu le vote protestataire.

Un peu comme si, chez nous, aux dernières élections, tous les sarkozystes s’étaient regroupés au Nord de Paris, tandis que les hollandistes occuperaient le Sud de la Seine…On imagine l’ambiance dans la capitale !

Cette différence de vues remonte en fait…à l’origine du pays, même si elle n’est réellement mesurable que depuis la scission de l’ensemble des forces politiques, à partir des années 1960.

A l’époque, s’opposait déjà une Flandre majoritairement rurale, catholique et conservatrice à une Wallonie plus industrialisée, et par là même plus susceptible de voir se développer la thématique de la lutte des classes.

La question communautaire n’a fait que renforcer cette ligne de partage. Ce sont les chrétiens-démocrates (CD&V) qui ont porté traditionnellement les revendications communautaires flamandes. En Wallonie, au contraire, c’est le Parti socialiste (PS) qui incarne le premier le mouvement régionaliste. Cet axe CD&V-PS a marqué les successives réformes de l’Etat de son empreinte et permis d’aboutir à de nombreux compromis. Pas sûr que la N-VA, désormais majoritaire au Nord, prenne le relais avec autant de bonne volonté.

Et pourtant, le phénomène N-VA n’a rien d’éphémère. La force de ce parti nationaliste est d’avoir su ancrer son discours dans les racines du peuple flamand.

La N-VA reprend en effet à son compte le mythe de l’homme rural, que la Flandre célébrait au milieu du XIXème siècle dans les arts picturaux et la littérature. La Flandre reste aujourd’hui marquée par cet imaginaire du « vrai Flamand », homme de la terre et moteur, par son travail et sa rigueur, de performance économique.

A l’image des Tea party américains, la N-VA oppose aux masses laborieuses flamandes les élites urbaines socialistes trop souvent corrompues. Voter pour les forces conservatrices devient alors un acte de résistance à l’oppression francophone. Les « assistés » sont également désignés comme les ennemis, avec ce raccourci souvent esquissé : Wallon = assisté.

Si le scénario d’une scission imposée par la Flandre reste peu crédible, la Flandre de droite et la Wallonie de gauche se préparent chacune de leur côté à l’éventuel démantèlement de l’Etat fédéral.

Les Wallons votent désormais PS, autant par atavisme qu’en réaction aux discours identitaires plus musclés du Nord du pays. Les francophones ont quitté la défensive pour à leur tour adopter un discours plus conquérant et revendicatif : l’on parle d’un « plan B » de séparation du pays, et l’on ne s’oppose plus à une décentralisation accrue, à condition qu’elle se fasse au bénéfice des Régions plus que des Communautés*.

De cet affrontement, Bruxelles est non seulement l’enjeu central. Elle est aussi un acteur à part entière, et se tient politiquement à part. Bruxelles est la seule terre francophone acquise aux libéraux du MR, et en périphérie, se maintient le FDF (Front démocrate francophone), tête de pont d’un communautarisme plus conquérant.

Comme quoi, entre le Nord et le Sud, la frontière politique n'est pas si étanche.

* La Belgique compte 3 régions (Flandre, Wallonie, Bruxelles) et 3 communautés (francophone, néerlandophone et germanophone).

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