Voilà, c’est fait. Au terme, comme il est de
coutume, de discussions aussi complexes qu’obscures entre les huit partis signataires,
l’ensemble de la classe politique belge, francophone comme flamande (à
l’exception notable de la nationaliste N-VA), a conclu un accord sur un sujet
devenu essentiel en l’espace de six mois, celui de la dotation royale, somme attribuée aux membres de la famille royale,
jusqu’ici non soumise à l’impôt et exclue de tout contrôle.
Un tel consensus
est exceptionnel en Belgique. Ce que ni la question de
l’avortement en 1990, ni les gaffes répétées du prince Laurent n’étaient
parvenus à faire jusque là, un dernier scandale, lié au pactole géré par la
reine Fabiola à travers des fondations exonérées d’impôts, est parvenu à
l’imposer.
Le scandale de trop ? Plutôt, sans doute,
celui qui arrivait au bon moment.
Il fallait bien que, pour la première fois de
l’histoire du pays, un socialiste francophone dirige le gouvernement belge. Ajoutons
à cela le contexte de crise que l’on connaît. Il devenait difficile de ne pas
afficher une détermination sans faille dans la chasse aux privilèges, fût-ce au
détriment d’une institution traditionnellement plutôt soutenue par la partie
francophone du pays.
Les intérêts francophones ont ainsi aussi subitement
que ponctuellement coïncidé avec ceux de la classe politique flamande, devenue
dans son ensemble hostile à une Monarchie trop francophone, symbole tant de
l’unité du Royaume, et de cette « Belgique à papa » tant décriée par
ailleurs.
L’affaire était donc conclue. A peine certains libéraux francophones ont-ils
réussi à objecter de la préservation de l’une des rares institutions stable du
pays.
Bien conscient de cette situation, le Roi
Albert II n’a pu que s’incliner, s’abstenant par ailleurs d’entrer dans le
débat ni d’en faire aucun commentaire... Position
incontournable, qui néanmoins revient à
remettre pour l’avenir son sort et celui de sa famille dans les mains de
la classe politique…
Désormais, seul le membre régnant et son
conjoint, ainsi que son héritier présomptif et son conjoint bénéficieront d’une
dotation. Encore, son usage sera-t-il contrôlé par la Cour des Comptes et son
montant partiellement soumis à l’impôt. La liste civile attribuée au Roi Albert
II (11,5 Millions d’euros) reste quant à elle pour l’instant épargnée,
conformément aux exigences constitutionnelles.
Une réforme donc essentiellement symbolique,
qui n’apportera au budget de l’Etat que quelques dizaines de milliers d’euros.
Mais
justement, le symbolique n’est-il pas le seul lieu de pouvoir qui subsiste pour
une monarchie devenue très largement protocolaire ?
Difficile pourtant dans ce domaine de parler d’une
« victoire » de la N-VA, comme l’ont soutenu certains. Les pouvoirs
royaux n’ont pas été remis à plat, et pour beaucoup d’intervenants, cette
réforme, devenue incontournable, devrait au contraire durablement apaiser les
plus ardents anti-monarchistes…qui ne manqueront pas de se manifester lors de
la succession d’Albert II, que certains annoncent plus proche que l’on ne le
penserait…