Au numéro 69 de la rue des Lombards, se
trouve un bâtiment dont l’existence même surprendrait la plupart des Français.
Dans un cadre feutré tout autant que moderne, siège ici, dans un hémicycle
dominant la ville, le Parlement bruxellois. Non, pas le parlement
fédéral : le parlement de la région de Bruxelles-capitale.
Fruit d’un difficile compromis entre Flamands
et Wallons, chacun gratifiés de leur propre région lors de la réforme de l’Etat
de 1980, Bruxelles fut la dernière région autonome à être créée, par une loi du
12 janvier 1989.
Il n’était pas question, pour les Flamands,
que Bruxelles acquière le statut plein de région et renforce ainsi l’aile
francophone du pays. Au projet de troisième région proposé par les
francophones, eux ont toujours préféré l’approche communautaire, qui fait de la
langue le critère de dévolution d’attributions par l’Etat fédéral.
Bruxelles serait donc à la fois région et
communauté.
Elle est une région, mais pas trop. Ses
pouvoirs sont plus limités que ceux des régions flamande et wallonne : elle
n’a pas de pouvoir constitutif, et ses décrets en matière d’urbanisme et
d’aménagement du territoire ont une valeur juridique inférieure à celle des
autres décrets.
Mais elle est aussi plus qu’une région. Depuis
1995, lui ont été attribuées un grand nombre de compétences communautaires
(culture, transport, aides sociales).
Et comme le veut tout compromis, cette
nouvelle région se caractérise par la complexité de son fonctionnement, autant
que par sa lourdeur… Accrochez-vous, car cela ne fait que commencer !
Au Parlement bruxellois, qui est le Parlement
de la « région », siègent depuis 2001 pas moins de 89 députés (17 néerlandophones et 72
francophones). L’augmentation de la représentation néerlandophone ayant été
compensée, dans le cadre de nouvelles négociations, par l’augmentation du
nombre de députés francophones.
Evidemment, pour les questions communautaires,
chacun retourne siéger chez soi : les élus flamands à la Commission Communautaire Flamande (VGC),
les élus francophones dans une sorte de nouvelle instance parlementaire ; la
Commission communautaire française (ou COCOF).
Et pour les questions communautaires
bruxelloises intéressant les deux communautés, me direz-vous ? C’est très
simple, voyons, le Parlement se réunit alors en Commission communautaire commune (COCOM).
Et n’oublions pas cette question cruciale:
comment gouverner Bruxelles avec un tel attelage ?
La diversité des populations et des intérêts
représentés a abouti à la constitution d’un gouvernement bruxellois composé de
pas moins de six forces politiques. Et aucune symétrie entre partis flamands et
francophones : si les socialistes francophones participent au
gouvernement, ce n’est pas le cas de leurs homologues flamands, qui ont été
remplacés par le parti libéral…seul parti à ne pas être associé au pouvoir côté
francophone !
Une complexité qui n’a d’égal que l’enjeu que
représente cette ville pour chacune des deux autres régions.